Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/290

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— Sir Benedict Arundell !

— Sauvez-moi ! sauvez-moi ! cria du milieu de la flamme la malheureuse Amabel.

Benedict et le domestique se précipitèrent, mais il était trop tard ; et dans le délire d’une agonie horrible, elle fixait ses yeux effarés sur son ancien fiancé et murmurait à travers son râle : Benedict ici ! oh ! je suis trop punie !

Le domestique, épouvanté, hors de lui, s’élança pour aller chercher du secours, un médecin, de l’eau, tandis que Benedict tâchait d’étouffer le feu qui brûlait encore les vêtements de dessous d’Amabel sous un tapis arraché d’une table.

Quand le secours arriva, Amabel venait d’expirer.

Benedict éperdu se sauva, ne pouvant supporter cet affreux spectacle, et personne, dans cette catastrophe, ne fit attention à sa venue et à sa sortie.

Quelques jours après, on remit à lady Eleanor Braybrooke quelques lettres à demi brûlées ramassées sur le plancher, qui expliquèrent la cause de cet affreux événement. Lady Braybrooke, à travers ses larmes, déchiffra les quelques lignes mutilées qui restaient, et comprit que ces fragments de papier, cause de l’accident, étaient des lettres d’amour de Benedict, découverte qui augmenta encore la haine que la bonne dame lui avait vouée.

Bizarre coïncidence, fatalité inexplicable ! les lettres d’amour de Benedict avaient repris Amabel au moment où elle en attendait un autre. Une âme superstitieuse eût pu voir là un châti-