Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/70

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À qui pouvait s’appliquer cette phrase murmurée avec un accent étrange ?

Les voitures détournant le coin de la rue arrivèrent devant le porche de l’église.

Alors l’homme que nos lecteurs ont déjà reconnu pour le voyageur si pressé rejeta son manteau en arrière, et parut s’affermir sur ses talons, comme quelqu’un qui touche à un moment suprême.

Le marche-pied s’abattit. Amabel, s’appuyant légèrement sur la main de Benedict, allait descendre et pénétrer sous le porche, lorsque l’inconnu, ayant fait un profond salut à la fiancée, toucha le bras d’Arundell, qui se retourna vivement, tout étonné d’une semblable interruption dans un tel moment ; car, tournant le dos à l’église, il n’avait pas vu s’avancer l’homme au manteau.

— Sidney ! s’écria Benedict revenu du premier éblouissement.

— Lui-même ! répondit d’un ton grave l’homme ainsi nommé.

— Et moi qui vous accusais d’indifférence. Venir ainsi des Indes pour assister à mon mariage ! c’est donc à cause de cela que vous n’avez pas répondu à mes lettres ; vous vouliez me ménager cette surprise !

— Benedict, j’avais un mot à vous dire, et c’est pour ce mot que je suis venu.

— Vous le direz plus tard. Tantôt je vous présenterai à ma femme, et, ma foi ! vous êtes déjà tout présenté. Lady Arundell, sir Arthur Sidney.

— Non, il faut que je vous parle sur-le-champ, seul à seul, ne fût-ce qu’une minute.

Il y avait dans le regard de Sidney quelque