Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/313

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teur, ses réflexions sur le Cid, Corneille, qui était loin d’être aussi modeste et patient qu’on a eu la fantaisie de le représenter, lui adressa une lettre très-piquante, et lui décocha un rondeau en style marotique, qui vaut bien le madrigal, et qui en est la palinodie :


Qu’il fasse mieux, ce jeune jouvencel
À qui le Cid donne tant de martel,
Que d’entasser injure sur injure,
Rimer de rage une lourde imposture,
Et se cacher ainsi qu’un criminel.
Chacun connoît son jaloux naturel,
Le montre au doigt comme un fou solemnel,
Et ne croit pas en sa bonne écriture.
Qu’il fasse mieux.

Paris entier ayant lu son cartel
Léenvoye au diable, et sa muse au…
Moi j’ai pitié des peines qu’il endure,
Et comme amy, je le prie et conjure,
S’il veut ternir un ouvrage immortel,
Qu’il fasse mieux.


Omnibus invideas, livide, nemo tibi.


— Scudéry fit cette critique, adressée à l’illustre Académie, pour faire sa cour au cardinal-duc, qui voyait avec peine le succès éclatant du Cid éclipser celui de ses propres pièces, et qui ne pouvait souffrir que Corneille, qui d’abord avait été un des cinq auteurs travaillant sous ses ordres, eût fait mine de s’émanciper. C’est du moins ce que l’on dit. Pour moi, sans prétendre que ce motif y ait été absolument étranger, je pense que Scudéry peut bien l’avoir faite pour se contenter, et que de très-bonne foi il trouvait la pièce détestable. Qu’y a-t-il d’é-