Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/367

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mes cuisses ont fait d’abord un angle obtus, et puis un angle égal, et enfin un aigu ; mes cuisses et mon corps en font un autre, et, ma tête se penchant sur mon estomac, je ne ressemble pas mal à un Z. J’ai les bras raccourcis aussi bien que les jambes, et les doigts aussi bien que les bras ; enfin, je suis un raccourci de la misère humaine. Voilà à peu près comme je suis fait. Puisque je suis en si beau chemin, je vais t’apprendre quelque chose de mon humeur. Aussi bien cet avant-propos n’est-il fait que pour grossir le livre à la prière du libraire, qui a eu peur de ne retirer pas les frais d’impression, sans cela il serait très-inutile, aussi bien que beaucoup d’autres ; mais ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on fait des sottises par complaisance, outre celles que l’on fait de son chef.

« J’ai toujours été un peu colère, un peu gourmand, un peu paresseux. J’appelle souvent mon valet sot, et un instant après monsieur. Je ne hais personne, Dieu veuille qu’on me traite de même. Je suis bien aise quand j’ai de l’argent, et je serais encore plus aise si j’avais de la santé. Je me réjouis assez en compagnie. Je suis assez content quand je suis seul. Je supporte mes maux assez patiemment. Mais il me semble que mon avant-propos est assez long, et qu’il est temps que je le finisse. »

Dans une lettre à Marigny, il dit : « Quand je songe que j’ai été sain jusqu’à l’âge de vingt-sept ans, assez pour avoir bu souvent à l’allemande ! » Le Typhon renferme un passage où le poète parle du commencement de son mal, qui le prit dans le temps que la reine accoucha de Louis XIV. Voici l’endroit :