Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/261

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de la partie pittoresque ; cependant ces messieurs continuent à boire et cherchent le caractère.

.....Des bougies blanches et transparentes comme des stalactites brûlent, en répandant une odeur parfumée, sur de grands flambeaux précieusement ciselés. Leur lumière rose et bleue danse autour de la mèche, tantôt calme, tantôt échevelée ; selon les mouvements des convives et des courants d’air qui traversent la salle, elle monte droite comme un poignard, ou s’éparpille comme une crinière. Les cristaux la répercutent dans leurs mille facettes, et la renvoient à toutes les saillies de l’argenterie et de la porcelaine. Chaque ustensile a son reflet et sa paillette étincelante ; tout reluit, tout miroite : le satin des chairs, le satin des robes, les diamants des colliers, les diamants des yeux, les perles des bouches et celles des boucles d’oreilles ; les rayons se croisent, se confondent et se brisent ; des iris prismatiques se jouent sous toutes les paupières, un brouillard chatoyant, une espèce de poussière lumineuse enveloppe les convives : c’est le beau moment. Les langues se délient, les mains se cherchent, les confidences et les propos d’amour vont leur train ; on mange, on rit, on chante, les verres circulent et se choquent, les bouteilles se brisent, les bouchons du champagne vont frapper le plafond, on pille les assiettes, on se trompe de genoux ; c’est un désordre ravissant, un tapage à rendre l’ouïe à un sourd.

Je crois qu’en voilà assez pour montrer qu’au