Page:Gautier - Loin de Paris.djvu/79

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pendant ce temps, la physionomie pâmée, les yeux noyés ou flamboyants, la narine frémissante, la bouche entr’ouverte, le sein oppressé, le col ployé comme une gorge de colombe étouffée d’amour, représentent à s’y tromper le mystérieux drame de volupté dont toute danse est le symbole.

Pour que l’assemblée ne perdît aucun détail, un nègre portant une bougie suivait la danseuse dans toutes ses évolutions, haussant et baissant son luminaire pour faire admirer tantôt le visage, tantôt la gorge, le bras ou autre chose ; le nègre accompagnait cette démonstration bizarre de grimaces lascives et de gambades de singe, qui paraissaient faire grand plaisir à la partie indigène du public.

La danse achevée, Zorah fit lentement le tour du patio ; les uns lui tendaient de petits verres d’anisette dans lesquels elle trempait ses lèvres ; d’autres lui suspendaient aux oreilles des guirlandes de fleurs de jasmin passées dans un fil ; quelques-uns, plus généreux, lui plaquaient sur le front, sur les joues, sur la poitrine, sur les bras, sur l’endroit enfin qu’ils admiraient le plus en elle, de minces pièces d’or retenues par la sueur.

Sa collecte finie, Zorah revint au milieu de la cour, la figure couverte d’un masque d’or. Deux de ses ser-