— Quel âge avez-vous ? demanda Lucienne.
— Dix-huit ans.
— Ah ! dit-elle avec un sourire.
— Vous ne trouvez pas que j’ai raison ? reprit-il. Deux êtres qui s’aiment, s’épousent et ont beaucoup d’enfants, connaissez-vous rien de plus plat ?
— Vous dites des folies, répondit Lucienne, qui n’écouta plus les divagations de son danseur.
Bientôt, se disant lasse, elle retourna à sa place prés de madame Després, qui faisait consciencieusement tapisserie. M. Provot était allé jouer au billard.
— Regardez donc Jenny, dit madame Després à Lucienne, la joie éclate dans toute sa personne, ses pieds n’ont plus l’air de toucher le parquet. Ce n’est pas elle qui reviendrait s’asseoir avant que l’orchestre se soit tu ! Vous n’aimez donc pas la danse, vous ?
— La femme devrait pouvoir choisir son danseur, répondit Lucienne ; rien n’est plus ennuyeux que de danser avec quelqu’un qu’on ne connaît pas.
— Quand on aime la danse, on danserait avec un manche à balai, dit madame Després. Vous n’aimez pas le quadrille pour lui-même ?
Adrien s’approcha enfin de la jeune femme.
— Valsez-vous, Lucienne ? dit-il.
— Avec vous ? oui.
— Est-ce celui-là que vous auriez choisi ? dit madame Després avec un fin regard.
Lucienne, un peu confuse, baissa les yeux en souriant.