Page:Gautier - Ménagerie intime (Lemerre 1869).djvu/55

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prouvé son patron. Enjolras, le sobre et pur jeune homme, lui eût dit sans doute, comme l’ange à Swedenborg : « Tu manges trop ! » On favorisa cette gloutonnerie amusante comme celle des singes gastronomes, et Enjolras atteignit une taille et un poids rares chez les félins domestiques. On eut l’idée de le raser à la façon des caniches, pour compléter sa physionomie de lion. On lui laissa la crinière et une longue floche de poils au bout de la queue. Nous ne jurerions pas qu’on ne lui eût même dessiné sur les cuisses des favoris en côtelettes comme en portait Munito. Accoutré ainsi, il ressemblait, il faut l’avouer, bien moins à un lion de l’Atlas ou du Cap qu’à une chimère japonaise. Jamais fantaisie plus extravagante ne fut taillée dans le corps d’un animal vivant. Son poil rasé de près laissait transparaître la peau, prenait des tons bleuâtres,