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MADEMOISELLE DE MAUPIN.

mier ; on dirait des plans de devant d’un paysage composé ou des coulisses d’une décoration de théâtre, tellement ils sont d’une difformité curieuse ; — des lierres, qui vont de l’un à l’autre et les embrassent à les étouffer, mêlent leurs cœurs noirs aux feuilles vertes, et semblent en être l’ombre. — Rien au monde n’est plus pittoresque. — La rivière s’élargit, à cet endroit, de manière à former un petit lac, et le peu de profondeur permet de distinguer, sous la transparence de l’eau, les belles plantes aquatiques qui en tapissent le lit. Ce sont des nymphæas et des lotus qui nagent nonchalamment dans le plus pur cristal avec les reflets des nuées et des saules pleureurs qui se penchent sur la rive : le château est de l’autre côté, et ce petit batelet peint de vert-pomme et de rouge vif vous évitera de faire un assez long détour pour aller chercher le pont. — C’est un assemblage de bâtiments construits à différentes époques, avec des pignons inégaux et une foule de petits clochetons. Ce pavillon est en brique avec des coins de pierre ; ce corps de logis est d’un ordre rustique, plein de bossages et de vermiculages. Cet autre pavillon est tout moderne ; il a un toit plat à l’italienne avec des vases et une balustrade de tuiles et un vestibule de coutil en forme de tente : les fenêtres sont toutes de grandeurs différentes, et ne se correspondent pas ; il y en a de toutes les façons : on y trouve jusqu’au trèfle et à l’ogive, car la chapelle est gothique. — Certaines portions sont treillissées, comme les maisons chinoises, de treillis peints de différentes couleurs, où grimpent des chèvrefeuilles, des jasmins, des capucines et de la vigne vierge dont les brindilles entrent familièrement dans les chambres, et semblent vous tendre la main en vous disant bonjour.

Malgré ce manque de régularité, ou plutôt à cause de