Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/133

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quelque temps dans la maison où l’on m’a recueilli. J’espère, dans quelques jours, pouvoir aller mettre mes hommages aux pieds de doña Feliciana.

« ANDRÈS DE SALCEDO »


Cette lettre, passablement machiavélique, n’indiquait pas l’adresse de la maison, ne précisait rien, et laissait à celui qui l’avait écrite la latitude de colorer plus tard les circonstances de la teinte nécessaire ; elle devait suffire pour calmer les craintes du bonhomme et de Feliciana et faire gagner du temps à Andrès, qui ne savait pas Geronimo si bien instruit, grâce à la sagacité d’Argamasilla et de Covachuelo.

La tia Aldonza porta la missive à la poste, et Andrès, tranquille de ce côté-là, s’abandonna sans réserve aux sensations poétiques et douces que lui inspirait cette pauvre chambre rendue si riche par la présence de Militona.

Il éprouvait cette joie immense et pure de l’amour vrai qui ne résulte d’aucune convention sociale, où n’entrent pour rien les flatteries de l’amour-propre, l’orgueil de la conquête et les chimères de l’imagination, de cet amour qui naît de l’accord heureux de la jeunesse, de la beauté et de l’innocence : sublime trinité !

Le brusque aveu de Militona, au dire des raffinés qui