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Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/135

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— Ho ! gloussa péniblement l’aimable insulaire, les sauvages en Australie font mieux que cela ! c’est l’enfance de l’industrie ; à Londres, on ne voudrait pas de ce chiffon pour envelopper les bougies de suif.

— Parlez anglais, sir Edwards, dit Feliciana, vous savez que j’entends cette langue.

— No ! je aime mieux perfectionner moi dans l’espagnol, langage qui est le vôtre. »

Cette galanterie fit sourire Feliciana. Sir Edwards lui plaisait assez. Il réalisait bien mieux qu’Andrès son idéal d’élégance et de confortable. C’était, sinon le plus civil, du moins le plus civilisé des hommes. Tout ce qu’il portait était fait d’après les procédés les plus nouveaux et les plus perfectionnés. Chaque pièce de ses vêtements relevait d’un brevet d’invention et était taillée dans une étoffe patentée imperméable à l’eau et au feu. Il avait des canifs qui étaient en même temps des rasoirs, des tire-bouchons, des cuillers, des fourchettes et des gobelets ; des briquets se compliquant de bougies, d’encriers, de cachets et de bâtons de cire ; des cannes dont on pouvait faire une chaise, un parasol, un pieu pour une tente et même une pirogue en cas de besoin, et mille autres inventions de ce genre, enfermées dans une quantité innombrable de ces boîtes à compartiments que charrient avec eux du pôle arctique à l’équateur les fils de la perfide Albion,