IV
« Ce n’est pas le tout de connaître le nid de la colombe, se dit don Andrès en s’éveillant après un sommeil que l’image de Militona avait traversé plus d’une fois de sa gracieuse apparition, il faut encore arriver jusqu’à elle. Comment s’y prendre ? Je ne vois guère d’autre moyen que de m’aller établir en croisière devant sa maison, et d’observer les tenants et les aboutissants. Mais si je vais dans ce quartier, habillé comme je suis, c’est-à-dire comme la dernière gravure de mode de Paris, j’attirerai l’attention, et cela me gênerait dans mes opérations de reconnaissance. Dans un temps donné, elle doit sortir ou rentrer ; car je ne suppose pas qu’elle ait sa chambrette approvisionnée pour six mois de dragées et de noisettes ; je l’accosterai au passage avec quelque phrase galamment tournée, et je verrai bien si elle est aussi farouche à la conversation qu’elle l’était à la place des Taureaux. Allons au Rastro acheter de quoi nous transformer de fashionable en manolo ; ainsi déguisé, je n’éveillerai les soupçons d’aucun jaloux et d’aucun frère féroce, et je pourrai, sans faire semblant de rien, prendre des informations sur ma belle. »