Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/80

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l’église de San-Isidro. Mais, de grâce, partez : il y va de votre vie. »

« Merci, brave homme, dit Andrès en mettant un réal dans la main du sereno, vous pouvez continuer votre route. »

La rue était tout à fait déserte, et Andrès se retirait à pas lents, lorsque l’apparition d’un homme enveloppé dans un manteau, sous lequel le manche d’une guitare dessinait un angle aigu, éveilla sa curiosité et le fit se blottir dans un coin obscur.

L’homme rejeta les pans de son manteau sur ses épaules, ramena sa guitare par devant, et commença à tirer des cordes ce bourdonnement rythmé qui sert de basse et d’accompagnement aux mélodies des sérénades et des séguidilles.

Il était évident que ces préludes bruyants avaient pour but d’éveiller la belle en l’honneur de qui ce bruit se commettait ; et, comme la fenêtre de Militona restait fermée, l’homme réduit à se contenter d’un auditoire invisible, malgré ce dicton espagnol qui prétend qu’il n’est pas de femme si bien endormie à qui le frémissement d’une guitare ne fasse mettre le nez à la fenêtre, après deux hum ! hum ! profondément sonores, commença à chanter les couplets suivants avec un fort accent andalou :


 
Enfant aux airs d’impératrice,
Colombe au regard de faucon,