A l’heure enchanteresse, où sur le bout des branches
On voit se becqueter les tourterelles blanches
Et les bouvreuils au nid,
Quand la nature lasse en s’endormant soupire,
Et que la feuille au vent vibre comme une lyre
Après le chant fini ;
Quand le calme et l’oubli viennent à toutes choses
Et que le sylphe rentre au pavillon des roses
Sous les parfums plié ;
Emus de tout cela, pleins d’ardeurs inquiètes
Vous avez souhaité ma liste et mes conquêtes ;
Vous m’avez envié
Les festins, les baisers sur les épaules nues,
Toutes ces voluptés à votre âge inconnues,
Aimable et cher tourment !
Zerbine, Elvire, Anna, mes Romaines jalouses,
Mes beaux lis d’Albion, mes brunes Andalouses,
Tout mon troupeau charmant.
Et vous vous êtes dit par la voix de vos âmes :
Comment faisais-tu donc pour avoir plus de femmes
Que n’en a le sultan ?
Comment faisais-tu donc, malgré verroux et grilles,
Pour te glisser au lit des belles jeunes filles,
Heureux, heureux don Juan !
Conquérant oublieux, une seule de celles
Que tu n’inscrivais pas, une entre tes moins belles
Ta plus modeste fleur,
Oh ! combien et longtemps nous l’eussions adorée !
Elle aurait embelli, dans une urne dorée,
L’autel de notre cœur.
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