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GÉRARD DE NERVAL.

de Gérard, resta longtemps chez nous, car nous possédions seul une chambre assez vaste pour qu’il y pût tenir. Nous devions nous éclipser au moment solennel ; mais la divinité pour laquelle ce temple avait été bâti n’y descendit jamais. Balzac admirait beaucoup cet élan sublime d’imagination qui supprimait la réalité et arrivait droit à sa chimère sans tenir compte du temps ni des obstacles. Ce n’était pas chez Gérard fatuité, certitude du triomphe, confiance outrée en ses moyens de séduction ; personne ne fut plus humble, plus timide, moins ravi de soi-même ; c’était la force de projection du rêve, cette puissance de créer hors du temps et du possible, une vision presque palpable, pour ainsi dire, et qui devait fatalement aboutir à l’hallucination maladive.

En ces jours d’excentricité littéraire, parmi