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GÉRARD DE NERVAL

gent qu’il avait reçu d’un ministère pour une mission en Syrie, qu’il ne se sentait plus capable de remplir. C’est alors qu’il entreprit d’écrire un livre qui, depuis longtemps, roulait dans sa pensée et qui semblait se refuser à toute condensation littéraire. Nous voulons parler d’Aurélia ou le Rêve et la Vie, une des plus étranges productions qui soient sorties d’une plume humaine. On a dit d’Aurélia que c’était le poëme de la Folie se racontant elle-même. Il eût été plus juste encore de l’appeler la Raison écrivant les mémoires de la Folie sous sa dictée. Le philosophe y assiste avec sang-froid aux visions de l’halluciné. Il ne les dément pas, il ne les combat pas ; il les explique, il en montre le point de départ, il en suit la filiation, il en détermine les rapports avec les milieux, les circonstances, les accidents, les antériorités et les souvenirs de la