Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/147

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ter des chemises dans sa malle, des napoléons dans sa poche, et faire viser son passe-port, n’en eût-on aucune envie et fût-on retenu par les affaires les plus urgentes.

Nous qui n’avons pas d’affaires urgentes et qui sommes toujours ravi lorsqu’on nous fournit un prétexte plausible de changer le décor de notre existence, à la deuxième interpellation de ce genre, nous étions en route.

Par un concours de circonstances singulières, nous ne connaissions pas Baden, nous qui avons tant erré d’un côté et de l’autre du Rhin, et que les douaniers du pont de Kehl saluent familièrement comme un ami ?

Aussi, le soir, montions-nous dans l’express de Strasbourg, et, le matin même, arrivions-nous à destination sans autre aventure qu’un froid intense, hyperboréen, retraite de Russie, éprouvé en traversant les Vosges, et qui nous convainquit de la vérité axiomatique formulée par Méry : « Le fond de l’air est toujours froid. »

C’était bien notre faute ; un vieux routier comme nous eût dû se rappeler qu’en voyage, le meuble le plus indispensable est un manteau de fourrure, surtout l’été. — Parlez après cela de l’expérience ; elle sert à grand’chose !

Le débarcadère de Baden a des façons de chalet et