Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/256

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tonnées à tour de bras, quoique leur ardeur n’eût guère besoin de ce stimulant ; mais c’est l’usage espagnol, et jamais postillon n’y ferait faute.

Nous traversions un pays magnifiquement pittoresque, ayant à droite et à gauche des montagnes, des vallées, où coulaient, presque taris sur leur lit de pierres blanches, dont ils n’occupaient que la moitié, des torrents et des ruisseaux sans doute formidables en hiver. Des maisons aux toits de tuiles, aux étroites fenêtres, bâties avec les cailloux des torrents, rappelaient à propos la présence de l’homme et faisaient des taches harmonieuses sur les fonds verts ou bleutés du paysage.

Nous descendîmes d’un train d’enfer la Descarga, cette pente dont sept ou huit lacets qui forment la route atténuent à peine la roideur presque perpendiculaire. C’était pour notre part la troisième fois que nous opérions cette dégringolade sans balancier ; nous arrivâmes au bas de la montagne avec nos membres intacts, chose étrange ! Il est vrai, par compensation, que nous versâmes plus loin sur une route parfaitement plane, de la façon la plus douce du monde.

Ce n’est pas le tout de descendre, il faut remonter, car tout vallon a deux versants. Pour gravir la pente escarpée de Salinas, dont nous apercevions sur un ren-