Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/281

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cupés à ne rien faire et « prenant le soleil » avec une majesté tout espagnole.

Maintenant, chacun passe et marche d’un pas affairé. On ne voit plus, comme autrefois, de Valenciens aux grègues de toile blanche, aux cnémides bordées de bleu, portant sur l’épaule leur cape bariolée de couleurs vives ; de Maregates à la casaque de cuir serrée par la boucle de cuivre d’un large ceinturon ; de Castillans à la veste en peau d’agneau noir et à la casquette en peau de loup ; d’Andalous coiffés du chapeau écimé et retroussé en turban et vêtus de leur svelte costume qui rappelle celui de Figaro ; de Gallegos en veste brune, avec les culottes courtes et les bas drapés ; mais nous constaterons que l’intelligente coquetterie des femmes a repoussé courageusement l’affreux chapeau qui avait tenté d’envahir la péninsule. La délicieuse mantille nationale, qui encadre si gracieusement les jolies têtes des Espagnoles, a reconquis ses droits ; elle règne en souveraine absolue. Cela nous a fait plaisir, car nous aimons qu’un peuple, tout en adoptant les perfectionnements de la science moderne, garde son aspect et ses modes typiques. La mantille n’empêche ni l’éclairage au gaz, ni le télégraphe électrique, ni les chemins de fer.