Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/317

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comme une tour. Le sanctuaire s’enveloppe d’une forteresse. Devant le portail, des lions héraldiques barbarement sculptés mâchent d’un air furieux un mors de fer d’où partent des chaînes qui les relient entre eux. De chaque côté de la porte, montent la garde deux statues représentant un homme et une femme sauvages tout couverts de poils frisés comme ceux des ours. Quand on pénètre dans la cathédrale, on est frappé de sa nudité austère qui contraste avec le luxe d’ornementation des églises espagnoles. La teinte sombre du granit dont sont faites les colonnes et les voûtes, jointe au rembruni du temps, donne à l’intérieur de l’édifice cette mélancolie mystérieuse et cette tristesse romantique qu’on cherche vainement dans les églises en style gothique du Midi. L’ombre s’entasse au fond des chapelles, où miroitent vaguement quelques reflets de dorures, et partout règne un demi-jour favorable à la prière et au recueillement, car les fenêtres sont étroites et pareilles à des meurtrières. Aucun badigeon, aucun coloriage n’empâte les nervures des arcs ni les parois des murailles, et le vieux monument garde la précieuse patine des siècles. On nous montra dans une chapelle ou salle de sacristie d’assez curieux bas-reliefs en bois peint et verni qui ressemblaient par leurs luisants à