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212 TABLEAUX À LA PLUME.

appropriée à l’artiste qui a le plus aimé, le mieux senti le soldat de l’Empire, et ses dessins sont autant de petits chefs-d’œuvre.

Rappelons le superbe dessin de Bida, la Cérémonie du Dosseh au Caire. Ce mot Dosseh a besoin de quelque explication. Le chef de l’ordre des Derviches, fondé par Sâad-Eddin, sort de la mosquée ; des fanatiques se couchent sur son passage et sont foulés par les pieds de son cheval. L’artiste a exprimé avec une profondeur admirable la quiétude fataliste de l’islam et la foi ardente de ces malheureux qui pavent de leur corps la route du derviche impassible ; le seul qui éprouve un sentiment parmi cette multitude fanatisée, c’est le cheval : il baisse la tête, renifle et lève ses sabots délicatement pour ne blesser personne. Le Puits du Liban n’a pas moins de mérite que le Dosseh.

Et, maintenant, disons quelques mots pour finir du dessin lavé d’aquarelle de Théodore Rousseau, dont la gravure accompagne notre article : le soleil se lève à l’horizon d’un paysage où ruisselle une rivière entre des rives plates, ouvrant ses rayons comme les lames d’un éventail d’or, et sur l’eau frissonnent au vent du matin des moires de lumière.

(Gazette des Beaux-Arts, 15 février, 1er et 15 mars 1800.)