Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/114

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De pareilles montures ne peuvent être chevauchées que par des êtres allégoriques ou mythologiques. Une Renommée le clairon en main, un Mercure reconnaissable à son caducée, légèrement suspendus aux flancs de ces nobles bêtes comme les écuyers d’un cirque céleste ayant des dieux pour spectateurs, semblaient les guider par la volonté seule. Rien de plus élégant que ces deux groupes équestres taillés dans un nuage de marbre blanc et dessinant leur contour sur un bleu de pâte tendre. A la beauté ils joignent l’air de galanterie héroïque qui est le caractère de l’art de Louis XIV. En ce moment ils étaient éclairés par le rayon le plus favorable.

La terrasse descendait vers le jardin par deux belles courbes en fer à cheval aboutissant aux magnifiques groupes de la Saône et de la Loire, et encadrait à merveille ce coup d’œil sans rival au monde.

Cependant, deux à deux, paisiblement, autour du grand bassin, les chevaux du train montés par les artilleurs manégeaient et se dégourdissaient du froid nocturne. Des soldats agenouillés sur le rebord du bassin d’où les cygnes s’étaient envolés « lavaient des torchons radieux. » Le jet