Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/278

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l’abandon, non moins beaux pour cela, habillés de lierre, les pieds dans l’herbe haute, entre-croisant leurs branches, confondant leurs cimes avec un désordre à faire honte à M. Le Nôtre et à charmer les paysagistes. On découvre pourtant bien vite qu’ils n’ont pas été plantés là par le hasard. Leurs troncs, comme les colonnes d’une salle écroulée, dessinent un espace vide, montueux, fouillé d’excavations, dont on retrouve la régularité sous le désordre des herbes folles et des végétations parasites. En effet, c’était là que s’élevait, au temps du Versailles primitif, cet arc de triomphe ou plutôt ce château d’eau triomphal, objet de l’admiration des contemporains. Il n’en reste aujourd’hui plus trace que le terrain bouleversé par l’extraction des matériaux et depuis longtemps recouvert d’herbe.

Cependant si vous tournez un peu vers le massif d’arbres en entrant, vous découvrez dans un état de délabrement complet, un groupe magnifique où la nature a travaillé à sa façon, plaquant ici des chamarrures de mousses noires, semant ici une fleurette jaune, profitant plus loin du descellement d’une pierre pour y insérer un paquet de scolopendres.