Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/99

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céder et nous parjurer vis-à-vis de nous-même. Nous n’y pouvions plus tenir. Nous voilà donc parti avec notre compagnon habituel d’expédition.

En passant près de l’arc de triomphe, nous remarquâmes qu’on avait enfin recouvert de planches les bas-reliefs des deux façades. On avait d’abord songé à préserver le chef-d’œuvre de Rude, le Départ des Volontaires, et le groupe de Cortot, moins exposés pourtant, puisqu’ils regardent Paris. Bonne précaution après tout, quoiqu’une cicatrice de boulet ou d’obus ne dépare pas une sculpture héroïque.

Devant le solennel pylône, du côté où aboutit l’avenue de la Grande-Armée, il y a toujours un rassemblement, une espèce de club en plein air qui discute les questions du jour, et se transmet les nouvelles vraies ou controuvées. On peut y apprendre sur place comment se forment les légendes et comment l’imagination du peuple ajoute, en toute sincérité, à un fait réel ce qu’il faut pour devenir poétique ; là, de récits divers agrandis ou fondus ensemble, se compose petit à petit le romancero du rempart. Les exploits des mobiles et des francs-tireurs racontés par des