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Après le loup, on fit paraître un ours, successeur ou doublure de Carpolin : l’ours, réjoui de se trouver en liberté, et excité par les fanfares du cor, se mit à danser assez en cadence, ma foi ! Et pour compléter la bouffonnerie, tous les autres ours en cage, imitant leur confrère, se mirent à trépigner lourdement et à faire des cabrioles dans leurs bouges ; ce ballet d’ours était fort récréatif ; mais la joie de M. l’ours fut de courte durée, car on lui mit aux trousses une demi-douzaine de dogues qui le firent détaler au grand galop et quitter sa position de bipède pour celle de quadrumane : soit par lâcheté, soit qu’il dédaignât de si faibles ennemis, il courait devant la meute sans se défendre ; seulement, il se retournait de temps en temps, s’asseyait sur son derrière, penchait la tête et regardait les chiens, qui faisaient cercle autour de lui, en renâclant d’une manière formidable. Cette espèce de râle guttural et nasal est tout ce que l’on peut entendre de plus effrayant en fait de cris de bêtes féroces. Aussi fait-il reculer les chiens les plus hardis.