Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 1.djvu/41

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d’accord, et que le chaos s’est réfugié dans la cervelle humaine. Voyons, dit-il en s’adressant, en désespoir de cause, non plus à une seule, mais à toutes les âmes réunies dans un coin de la salle, laquelle d’entre vous répondra sensément a ma question ? »

Mais la question n’avait pas encore été posée, qu’il s’éleva une grande rumeur parmi les âmes, — et chacune ayant la prétention d’être celle qui pouvait le mieux répondre, il fallut l’emploi de la force pour rétablir le silence.

« Où avais-je la tête, dit alors Satan, de penser que je pourrais apprendre quoi que ce soit de vous par vous-mêmes ! »

Puis s’adressant au guide qui avait escorté le convoi :

« Or çà, de quelle partie de la terre arrivent tous ces gens-là ?

— De Paris, répondit le guide.

— De Paris ! s’écria Satan ; quoi ! et le Turc aussi ?

— Le Turc aussi, répliqua le guide. Il y a de tout à Paris.

— Parbleu, reprit aussitôt Satan, j’en aurai cette fois le cœur net. Il y a assez longtemps que je veux savoir ce que c’est que ce Paris, pour que je m’en passe aujourd’hui même la fantaisie. — Quel dommage, dit-il, que je ne puisse planter là et mes États et surtout mes sujets ! Un voyage dans Paris, voilà un voyage à faire ! »

Et s’étant tourné vers sa suite, son regard tomba sur Flammèche, qui, n’ayant pas prévu le mouvement de Satan, baillait alors outre mesure.

« Tu bailles, lui dit Satan, donc tu t’ennuies ; et si donc tu t’ennuies, il pourra te convenir de faire un petit voyage. Il s’agit d’aller de ce pas à Paris, des expéditions de ce genre ne sont pas sans précédents. Tu y seras, sous la forme qu’il te plaira de choisir, mon correspondant et