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Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 2.djvu/93

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naire lui aurait retranché quoi que ce soit sur les dix livres de viande qui lui tiennent lieu de liste civile, il ne se ferait aucun scrupule, au mépris des traités, d’ouvrir un emprunt dans la partie la plus charnue de M. le directeur.

Nous avons eu déjà un grand nombre de montreurs de bêtes, et il n’en est pas un qui n’ait eu la plus grande peine à se faire prendre au sérieux. De temps en temps, quand nous apprenons, toujours par l’agence Havas, que l’un d’eux a été étranglé par ses pensionnaires, nous nous écrions :

« Tiens ! il parait que ses animaux étaient vivants ! »

Et tout retombe dans le silence.


Même maison. — Peut-être, après tout, les musulmans ont-ils raison d’épouser des femmes en bas âge. Ils ne laissent pas ainsi à la rouerie naturelle à l’autre sexe le temps de se développer. Dans notre religion, c’est tout le contraire. Tant qu’une fille est jeune, jolie et relativement innocente, elle marine dans la noire misère, et à mesure que la vieillesse arrive, au bras du maquillage, son fidèle compagnon, il surgit des cocodès qui couvrent ses imperfections naissantes sous des châles de dentelles et des colliers d’un prix impertinent.

C’est lorsque la femme est tout à fait décrépite qu’elle rencontre un jeune homme de vingt-deux ans, riche, beau et à la recherche de l’idéal. Elle lui prouve, clair comme deux et deux font neuf, qu’elle n’a jamais aimé que lui, et les bans ne tardent pas à se publier à la quatrième page, troisième colonne, des feuilles quotidiennes, sous la rubrique : même maison.


Les noms de comédie. — Les journaux ayant annoncé la première représentation de sa pièce, M. Sardou, l’auteur, n’a pas tardé à recevoir une lettre à cheval, dont le signataire, M. Benoîton, s’étonnait que M. Sardou eût précisément choisi son nom pour le ridiculiser dans une comédie en cinq actes. Remarquez ceci : M. Sardou aura beau déclarer et prendre à témoin tous les astres connus qu’il n’a jamais de sa vie entendu parler de M. Benoîton, que cet assemblage de lettres s’est présenté tout fortuitement sous sa plume, l’auteur de la lettre n’en restera pas moins convaincu que M. Sardou a obéi à une basse rancune en le