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des rois, aux mœurs, à la littérature et même à la religion. Cette influence a été prodigieuse, paradoxe à part ; elle méritait un chapitre dans Mézeray ou Anquetil, deux historiens détestables. On aurait lu ce chapitre, au moins :

Lorsque Pharamond eut commis l’énorme faute de se faire élire sur un pavois, dans les marécages de Lutèce, au 49e degré de latitude nord, il ne tarda pas à s’en repentir : l’humidité de son palais royal et les plages de son petit royaume lui procurèrent de nombreuses maladies, dont Mézeray ne parle pas, et qui le conduisirent au tombeau après un modeste règne de huit ans. On est saisi d’un véritable sentiment d’historique pitié en songeant que le fondateur de notre monarchie parisienne n’a fait que passer à travers les marécages de son royaume, et que son corps vigoureux s’est subitement éteint de consomption entre le double rhumatisme des pieds et du cerveau.

Son successeur comprit mieux que personne cette immense faute. Clodion avait entendu les longues doléances rhumatismales du fondateur de notre monarchie, et, pour prolonger son règne au delà de huit ans, il inventa la race des rois chevelus, et donna l’exemple à ses successeurs de ce préservatif capital. Rien n’égalait, dans les crinières fauves, l’ampleur opulente de la chevelure de Clodion ; et pourtant il ne se crut pas suffisamment garanti contre le climat de Lutèce, et il jeta un regard de convoitise vers la tiède Italie, où les rois avaient la faculté de se coiffer impunément à la Titus. La monarchie française, à peine fondée, était donc sur le point de s’écrouler, à cause des rhumes de cerveau. Clodion abandonna Lutèce et déclara la guerre aux Romains. Aétius commandait les têtes chauves de l’Italie, Clodion les têtes chevelues du département de la Seine. On se battit avec acharnement. Clodion, vaincu, prit la fuite, et en traversant, échevelé, les plaines de l’Artois, il n’échappa que par un miracle au destin d’Absa-