Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/13

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LA « VIERGE DE MISÉRICORDE » DE CHANTILLY 9 rite de s’approcher, le premier, le plus près de la vérité. Dans un fascicule du recueil Piot, à la date de mars 1904, il restituait à « l’école d’Avignon » la Vierge de Miséricorde de Chantilly1. Quel¬ ques semaines plus tard, au cours d’un article sur les Primitifs français paru dans la Revue de Paris du 1er mai dernier, il exprimait ses regrets que la Vierge de Miséricorde immobilisée à Chantilly ne pût être envoyée à l’Exposition, et il ajoutait : « il eût été d’un extrême intérêt de pouvoir placer cette œuvre auprès du Couronne¬ ment de la Vierge d’Enguerrand Charonton, car elle appartient à cette école d’Avignon2 ». On voit combien le rapprochement proposé était judicieux. Avec Enguerrand Charonton, le document de 1452 publié' par M. l’abbé Requin fait intervenir, comme appelé à travailler pour le tableau aujourd’hui à Chantilly, un autre peintre, Pierre Villate. Pierre Villate, dit Malebouche, venu du Limousin, a tenu un rang considérable dans l’école d’Avignon. Le tableau retrouvé au Musée. Condé est-il de nature, ainsi que l’espérait M. Bouchot, à four¬ nir un point de départ pour la recherche de ses autres œuvres, s’il en existe encore? Il faut renoncer à cette hypothèse. Dans la Vierge de Miséricorde de Chantilly, il n’y a rien qui dilFère de ce que nous montre le Triomphe de Villeneuve. C’est donc Enguerrand Charon¬ ton qui est l’auteur principal de l’œuvre; et Pierre Villate n’a vrai¬ semblablement rempli auprès de lui dans le travail commun qu’un rôle tout à fait secondaire. Il résulte, d’ailleurs, des documents que Pierre Villate a vécu jusqu’à l’extrême fin du xvcsiècle,qu’il a peut- être même vu l’aurore du xvic. Il devait être, par conséquent, en 1452 un artiste encore bien près de ses débuts, d’autant que nous le voyons à la même époque avoir un frère qui touchait à peine à ses quatorze ans. Si nous ne pouvons étudier que le seul Enguerrand Charonton dans J'œuvre possédée par le Musée Condé, il faut ajouter que, pour ce maître, l’œuvre est capitale. Le tableau, ayant un fond d’or, avec une bordure guillochée ana¬ logue à celle que nous montrent d’autres productions de l’école d’Avignon, était jadis sur bois. Un de ses possesseurs, très proba¬ blement M. Reiset, l’a fait transporter sur toile. Quoique l’opération 1. C. Benoit, Le tableau de l'Invention de la vraie Croix et l'École française du Nord dans la seconde moitié du siècle (dans le recueil Fondation Piot. Monuments et Mémoires, t. X, p. 263). 2. G. Benoit, Les Primitifs français (Revue de Paris, n° du 1er mai 1904, p. 196). XXXII. — 3e PÉRIODE.\t2