Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/232

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L’EXPOSITION DE L’ANCIEN ART SIENNOIS 203 entre les deux bustes — même par l’intermédiaire de reproductions nécessairement inexactes — établira que le stuc peint du Louvre n’est qu’une version rudimentaire et inférieure de ce marbre exquis. La reproduction de Bruckmann a été faite sans doute d’après le marbre de Sienne ou d’après une photographie, bic-n qu’on prétende qu’elle soit au Louvre. C’est là une étrange confusion. Quiconque possède une connaissance intime de l’art de Sienne, jugera que l’attribution à Neroccio est la plus plausible. Son nom est le plus probable de tous ceux qui ont été supposés, mais, pour le prouver, il faudrait un déploiement d’érudition et une plus longue série d’illustrations que ne comporte un article aussi court que celui-ci. Il faut donc renoncer, pour le moment, à cette tâche et me contenter de dire que l’œuvre en question est entièrement dans l’esprit de Neroccio, et qu’à mon avis c’est un chef-d’œuvre de déli¬ catesse, de raffinement et de subtilité d’interprétation. À ce propos on me permettra peut-être une courte incursion dans les champs stériles du pédantisme et du dilettantisme pour citer les autres œuvres de Neroccio qui font partie de celte expo¬ sition et dont aucune n’égale ce buste en beauté. 11 y a une Sainte Catherine de grandeur naturelle, taillée en bois et peinte. Elle appartient à la Contrada dell’ Oca. La peinture est si fruste et la statue a subi tant de restaurations bizarres qu’on la trouve à première vue désagréable; mais, après un examen plus attentif et plus prolongé, on lui découvre beaucoup de noblesse et de simpli¬ cité et un rythme dans la composition et le mouvement qui révèle l’artiste. Les chérubins ailés qui ornent le socle montrent le senti¬ ment délicat de Neroccio pour tout ce qui est joli et décoratif. La sainte elle-même est une figure pleine de dignité. Dans la section de peinture, également, se voit un Neroccio pro¬ venant de l’Àrchiconfrérie délia Santissima de Sienne : une Madone avec saint Jean-Baptisle et saint Michel, dans un cadre peint avec inscription, par Neroccio lui-même (salle XXXV, n° 16)1. L’expres¬ sion de la Arierge a ce mélange singulier de tendresse et de gaieté, de naïveté et d’espièglerie qui charme et attire dans l’œuvre de ce maître. Une autre peinture de Neroccio a passé inaperçue. C’est le 1. Ce tableau porte cette mention «Maniera di Francesco di Giorgio », peintre qui était le compagnon de Neroccio sous Vecriiielta. Il paraîtrait que ceux qui ont la responsabilité des attributions n’ont pas su discerner entre ces deux maîtres, car dans la salle XXXIV, n°2t, une Madone allaitant F Enfant, qui est évidemment de Francesco, est baptisée à son tour « Maniera di Neroccio ».