Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/277

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UN BOUQUET EN PORCELAINE DE VINCENNES 243 une fabrication en masse de ces pièces. C’est par quantités énormes qu’on exécutait ces fleurs, destinées à être montées sur des branches en bronze souvent pour accompagner des figures de Meissen qu’on faisait venir exprès, ou bien des curiosités de Chine, également en porcelaine. Presque toutes les vieilles porcelaines montées de cette époque, même celles de Meissen, ont des fleurs venues de France. On réunissait ensuite ces bouquets de fleurs, on les plaçait dans des vases et on les ornait de bronzes et autres accessoires en porcelaine h Cette fabrication fut favorisée par la possibilité d’appliquer sur la porcelaine tendre une gamme de couleurs plus riches et plus intenses que sur la porcelaine dure et, par conséquent, sur la porcelaine de Meissen. Une plus grande vérité naturaliste était donc possible ici. On paraît en avoir été particulièrement fier. On raconte que Mme de Pompadour, la protectrice zélée de cette manufacture, ayant montré un jour au roi Louis XV de pareilles fleurs dans sa serre, le roi les crut naturelles, et que cette illusion lui fit prendre grand plaisir aux produits de la manufacture2. Marie-Josèphe, à son tour, eut certainement aussi l’intention d’envoyer à son père un spécimen remarquable des travaux de la manufacüme française, afin de lui montrer que Meissen n’était pas seul à produire des ouvrages de porcelaine d’art importants, et elle y a bien réussi; mais, à coup sur, elle ne se doutait pas que ce qui devait restreindre la gloire de la manufacture de Meissen se transformerait plus tard en un nouveau titre de gloire pour celle-ci. C’est dans ce but, certainement, qu’elle a fait ajouter au bouquet les deux groupes de figures qui l’accompagnent. Car alors Vincennes avait encore l’ambition de rivaliser avec Meissen pour ses figures de porcelaine, qui, précisément à cette époque, étaient par¬ venues, avec Kàndler, à leur plus grande perfection. Cette tentative demeura, comme on sait, sans succès et ce fut, justement en 1749, lorsque ce bouquet fut envoyé à Dresde, qu’on en vit clairement l’impossibilité et qu’on créa ce genre de figurines en biscuit, où la porcelaine française acquit une célébrité comparable à celle dont jouissait la porcelaine de Meissen pour les figures peintes et émaillées. Les figures en porcelaine émaillée de la manufacture de t. Voir Lazare Duvaux, Livre-journal, 1873, vol. II; — Davillier, Les porce- laines de Mmç du Barry, 1870; — Stettiner, Vincennes und Sèvres (Jahrbuch der kôn. preussischen Kunstsamlungen, vol. XIV, p. 143) ; — E. Garnier, La porcelaine tendre de Sèvres. 2.\tUjfalvy-Bourdon, Les Biscuits de porcelaine. Paris, -1893, p. 12.