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296 GAZETTE DES BEAUX-ARTS Nous dirons la même chose du portrait d’Arnauld1 que nous reproduisons ici à cause de l’intérêt particulier qu’il présente, étant donné le personnage, qui fut secrétaire perpétuel de l’Académie française. C’est encore une peinture sèche, mais l’attitude d’Arnaud est très juste, et il y a dans l’œuvre un sentiment de vérité précise qui fait penser — de loin — à certains portraits de David ou d’Ingres. Vincent ne pouvait échapper au contre-coup de la Révolution, qui bouleversa l’organisation académique. Au début, il joua le rôle qu’on attend de lui, celui d’un réformiste modéré, destiné pré¬ cisément à être bientôt accusé de modérantisme; il eut alors à subir les attaques violentes de David, qui lui reprochait à la fois d’avoir des opinions politiques très molles et d’ « empoisonner les élèves du virus académique ». 11 traversa pourtant les années de la Ter¬ reur sans être inquiété. Puis, dès la réorganisation de l’Institut, en 4795, il fit partie de la classe de la littérature et des beaux-arts. Membre de toutes les commissions, à plusieurs reprises président ou rapporteur de la section, aucun des honneurs académiques ne lui manqua. Volontiers on l’opposait à David comme chef d’un groupe centre-gauche, qui s’affirma lors des Prix décennaux en 1810. Estimé pour son caractère, aimé pour son aménité, apprécié pour ses opi¬ nions toujours sages, écouté, quoiqu’il parlât un peu trop, il conserva des élèves, eut des succès dans tous les concours de l’École, où du reste il professait. Mais tout cela, c’était la retraite, une de ces retraites honorables et obscures, où parfois les Académies endorment douce¬ ment leurs membres les plus choyés. Il s’éteignit en 1816. Pendant ce temps, David, du même âge que Vincent, combattu par l’Aca¬ démie, presque renié par l’enseignement officiel, s’épanouissait en pleine maturité, se renouvelait et produisait quelques-unes de ses œuvres les plus fortes ou les plus originales : le Sacre, la Distribu¬ tion des aiglesy le portrait de Pié VII, même le LéonidaSy qui — après tout — est un grand effort. Et l’on voit bien par lout cela ce qui manquait à Vincent : la vigueur du tempérament, plus encore que les qualités de peintre. Né chétif, il le resta toute sa vie, et il donna l’exemple singulièrement 1. Il vient d’être légué aux Musées nationaux par Mme veuve Rivière et figu¬ rera à Versailles. Il est daté, signé et dédicacé : « A. Vincent à son ami Arnault, Tan 9, 1801 ». Le Conseil des Musées a accepté aussi le porLrait de Mmo Arnault par J.-R. Uegnault, dont les œuvres connues sont rares, et qui vaudrait d’êLre étudié.