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GAZETTE DES BEAUX-ARTS]

Au-dessus de la partie supérieure de ce cadre, une décoration de guirlandes de fleurs rattachées à des consoles relie, comme il a été dit ci-dessus, les grandes pièces aux bandes plus étroites portant les effigies des Apôtres. Cette disposition, répétée tout autour de l’église, assure l’unité de la composition et justifie par là cette superposition de deux bordures, anomalie qui ne s’explique que par la nécessité de relier les scènes principales aux panneaux intermédiaires.

Le rouge et le bleu dominent dans la coloration et donnent à l’ensemble un vif éclat. Les lumières ont pâli, tout en conservant une chaleur dorée, suivant les vraies traditions de l’art ; car les tapissiers des bonnes époques ont évité avec soin les blancs blafards et froids et ont toujours rehaussé d’un peu de jaune les lumières des bleus et des rouges.

Sans doute, ces compositions n’échappent pas à la critique. L’originalité fait défaut ; le dessin n’est pas sans reproches. On blâmera l’exagération de certaines formes ; par exemple, dans la scène de l’Ascension, le corps du Sauveur atteint des proportions démesurées ; on a cherché l’élégance par l’exagération de la longueur. Mais ces taches, assez légères en somme, disparaissent dans un ensemble d’une véritable somptuosité. L’effet décoratif est certainement fort heureux. Que demander de plus ?

Il faut louer aussi le mode de suspension imaginé pour tenir les tapisseries bien tendues. Une tringle de fer cousue au bas de chaque panneau empêche les plis et les déformations des figures. Ce système, que nous n’avons guère rencontré ailleurs, nous paraît des plus favorables à la bonne conservation des tentures. Il est bien préférable en tout cas aux clous qui déchirent les galons et dont l’usage devrait être abandonné pour la suspension des tapisseries.

L’état de conservation paraît satisfaisant ; toutefois, comme il ne nous a pas été donné d’examiner le tissu de près, nous ne saurions nous prononcer en parfaite connaissance de cause. Nous croyons savoir qu’à la suite d’une consultation sur place, donnée par Alfred Darcel, l’ancien administrateur de la manufacture des Gobelins, toute la série fut confiée à des ouvriers italiens pour faire disparaître les trous et les dégradations causées par la vétusté. Ils semblent s’être acquittés de leur tâche avec soin et habileté.


JULES GUIFFREY
(La suite prochainement.)