Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/445

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

380 GAZETTE DES BEAUX-ARTS L’initiative privée agissait de son côté. La Société des Amis des Arts avait ouvert au Louvre en 1792 une exposition où figuraient Swebach, Drolling, Boilly, Bidault, Gault de Saint-Germain, Bruan- det. Inutiles efforts. Alors la Convention, qui témoignait tant de sollicitude aux sciences et aux lettres, entreprit de ramener les arts à l’état de prospérité. Elle institua un grand concours en peinture, sculpture et architecture : « les peintres, les sculpteurs et même les architectes devaient exécuter en grand, comme monuments natio¬ naux, les ouvrages conçus par eux et couronnés par le juryi ». Deux cent cinq mille francs récompensèrent cent quarante esquisses. Swebach participa à la lutte : son esquisse ne remporta pas le premier prix, mais parut assez remarquable pour mériter une indemnité pécuniaire de deux mille francs2. On le classait au nombre des peintres de genre, catégorie d’ar¬ tistes regardés de haut par les élèves de David et les tenants du paysage historique. Mais qu’était au juste un peintre de genre sous le règne de David? Demandons-le à T.-G. Brunn Neergaard, qui nous a laissé des lettres si avisées et si spirituelles sur les arts et les artistes sous le Consulat. Voici le passage de cette correspondance où l’expression « tableau de genre » se trouve expliquée à ravir : « Mon ami, « Tu ne comprends pas sans doute ce qu’on entend par les mots tableau de genre; je dois te donner l’explication d’une expression qui ne m’était pas plus familière qu’à toi, lors de mon arrivée à Paris. Les autres langues peuvent offrir un terme équivalent à celui-ci, mais elles n’en ont pas un dont l’idée soit aussi étendue que dans le français. Sous le titre de tableau de genre, les artistes com¬ prennent le paysage, les tableaux d’üistoire qui appartiennent aux tems modernes, les batailles, les animaux, les intérieurs, les scènes domestiques, les marines, les fleurs, etc., etc.3. » Que de choses sous une étiquette! Comme on comprend les insuccès de Swebach, candidat à l’Institut (classe des Beaux-Arts), et candidat persévérant, qui se présenta trois fois, et échoua devant l’hostilité des représentants des genres dits nobles! 11 persévérait également dans la note adoptée ; il continuait à produire des Marches cVéquipages, des Attaques de batterie, des Pas¬ 1. V. Joachim Le Breton, Rapport sur les Beaux-Arts (séance du Conseil d’État du 5 mars 1808). (S. 1. n. d.), notamment p. 33-34. 2. Ibidem, p. 36. 3. T.-C. Brunn Neergaard, Sur la situation des Beaux-Arts en France ou Lettres d'un Danois à son ami. Paris, an IX (1801), lettre IV, p. 49.