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4-08 GAZETTE DES BEAUX-ARTS département des manuscrits et à celui des cartes géographiques. On n’en a jamais entendu parler. Nous avons seulement remarqué, dans la relation latine publiée par le prince de son voyage aux Indes occidentales, un paysage du Brésil sur lequel on voit un chariot à roues pleines, traîné par deux taureaux, rappelant un des épisodes les plus caractéristiques de la pièce du hamac porté par deux nègres, dite aussi Les Deux taureaux. Après avoir commandé les troupes des Provinces-Unies lors de l’invasion de la Hollande, le prince Maurice de Nassau se retira dans la principauté de Clèves, à lui concédée par l’élecleur de Brande¬ bourg. Il y créa un jardin de plantes rares qui devint fameux et que Voltaire a célébré. Un artiste strasbourgeois, Johan Walter, a peint diverses vues de ce jardin; elles portent les dates de 1652 à 1664. Les peintures originales de Walter sont conservées au cabinet des estampes de la Bibliothèque Nationale1. Les tableaux offerts par le prince Maurice de Nassau, à une date et dans des circonstances encore indéterminées, présentaient donc toutes les garanties de la plus scrupuleuse exactitude. Or, le roi Louis XIV s’intéressait singulièrement à ces produits des contrées lointaines. Il entretenait à Versailles, dans la ménagerie, des ani¬ maux importés à grands frais du Levant. 11 faisait peindre par Aubriet les poissons qu’on lui envoyait des ports du Midi, et qui étaient con¬ servés vivants dans un bassin rempli d’eau de mer. 11 avait toujours montré un goût prononcé pour les arbustes et les plantes dont les fleurs répandent des parfums violents. 11 devait donc prendre un vif intérêt à la vue de ces scènes inspirées par la faune étrange et la végétation luxuriante de l’Amérique du Sud. On ne songea pas d’abord à les employer comme modèles de tapis¬ serie; le goût du moment était ailleurs, quand les Gobelins étaient dans le premier éclat de leur organisation par Colbert. Mais voici qu’un jour les ateliers de basse lice, après avoir terminé plusieurs tentures importantes, vinrent à manquer d’ouvrage. C’est alors qiie M. de la Chapelle, contrôleur aux Gobelins, songea aux peintures de Maurice de Nassau. Ceci se passait vers 1687. Les tableaux, oubliés pendant des années, avaient souffert sans doute de cet abandon; on dut les faire réparer avant de les livrer aux tapissiers. Plusieurs artistes occupés ordinairement à des travaux de ce genre furent chargés de ce soin. Le peintre Houasse retoucha les figures, François Bonncmer 1. Sous la cote Ja 2o.