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460 GAZETTE DES BEAUX-ARTS I En ce qui concerne l’impressionnisme le malentendu est dissipé et, par un juste retour, ses chefs sont entrés vivants dans la gloire. Le crédit de l’école se mesure à la puissance de rayonnement de ses exemples et à l’âpreté que les collections publiques ou privées, étrangères et françaises apportent à en convoiter les créations ; rien n’a manqué à son triomphe : ni l’aveuglement d’une adulation exclusive, ni l’outrage du pastiche éhonté, ni la vulgarisation de la copie à bas prix. Nous voici loin des négations d’antan et des railleries amères dont le théâtre contemporain garde le témoignage1. Et pourtant il n’y avait pas eu révolution, mais simplement évolution normale, reprise et poursuite de revendications antérieures, extension ration¬ nelle de découvertes et de conquêtes entreprises par le romantisme et les maîtres de 1830. La peinture de figure « en plein air », n’est point, tant s’en faut, d’invention récente; Lecoq de Boisbaudran l’avait inscrite au programme des exercices salutaires, dans son code d'enseignement; Courbet l’a pratiquée, et des différences assez peu sensibles séparent le Portrait de Louise Colet, les Demoiselles des bords de la Seine, la Biche forcée sur la neige, des premiers tableaux de M. Monet, de Manet et de M. Cézanne. Plus Lard seulement M. Claude Monet entraînera le groupe vers l’analyse spéciale des ambiances et des phénomènes lumineux.On sait comment l’impressionnisme sut y réussir et quelle part revient à M. Renoir dans l’apothéose d’au¬ jourd’hui; il s’en trouve peut-être d’aussi essentielle : je n’en sais pas de plus séduisante. Watteau et Boucher ne désavoueraient pas ce transfuge de l’atelier Gleyre ; sa psychologie est l’insouciance du xviii6 siècle; il va d’instinct à tout ce qui semble la parure et le bonheur d’ici-bas; les spectacles familiers lui apparaissent comme autant de fêtes imaginées en son honneur : féeries de la campagne ensoleillée, épanouissements de lumière et de chair, de sourires et 1. Voir la Cigale de Meilhac et Halévy (1877), acte II, scène xm : Le Marquis Alors, bon! vous êtes peintre? Marignan Oui, mais je fais de la peinture qui n’est pas de la peinture... Le Marquis J’y suis : vous êtes impressionniste.