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histoire du mouvement janséniste

plus encore que l’hérésie, on fit à Port-Royal, en 1669, ce qu’aurait conseillé l’abbé de Saint-Cyran, ce qu’aurait fait sans hésiter la Mère Angélique ; chacun rentra dans le rang, et les religieuses que la persécution avait mises en évidence disparurent comme par enchantement. La Mère de Ligny, sœur de l’évêque de Meaux, l’un des dix-neuf évêques pacificateurs, reprit avec humilité ses fonctions d’abbesse et, lorsque son triennat fut achevé, elle fut heureuse de retrouver son ancienne place au chœur avec les simples religieuses. On élut pour lui succéder, le 22 juillet 1669, la prieure qui avait fait preuve d’un si grand courage en 1664 et depuis, celle qui avait osé mettre à la porte le docteur Chamillard, le prétendu supérieur que lui envoyait Péréfixe, la Sœur du Fargis. Cousine de la duchesse de Longueville[1] et du cardinal de Retz, tante de la duchesse de Lesdiguières, elle ne se prévalut en aucune façon d’un tel parentage, et elle gouverna sagement et sans bruit. Trois fois de suite elle fut réélue, et, en 1684, alors qu’elle avait repris, après l’élection de la Mère Angélique de Saint-Jean, ses anciennes fonctions de prieure, on la réélut abbesse, et de même en 1687. Elle se retira spontanément en 1660, pour se préparer à la mort, et elle mourut l’année suivante à l’âge de soixante-treize ans. Elle fut donc abbesse dix-huit ans, et durant ce temps, il ne s’est rien passé de remarquable, rien surtout qui marque le déclin dont parle Sainte-Beuve ; c’est l’effacement complet de Port-Royal en tant que monastère de filles. Suivant le précepte de saint Paul les femmes ne parlent pas dans l’Église. Et cependant la Sœur Angélique de Saint-Jean, fille de Robert d’An-

  1. On ignorait ce détail à Port-Royal, aussi la Mère du Fargis supplia-t-elle la princesse de ne plus l’appeler cousine.