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chapitre ii

Lainez, qui avait pour ainsi dire usurpé le généralat, causait du trouble dans l’Église. En plein concile de Trente, il combattait une décision solennelle relative au rôle de la grâce efficace, et les Pères indignés criaient : Sus au pélagien ! L’évêque de Paris, Eustache de Bellay, se plaignait qu’une compagnie née depuis deux jours fût venue au Concile pour introduire des dogmes nouveaux, pour troubler le repos de l’Église et pour en renverser la hiérarchie. Ces faits caractéristiques se sont passés en 1562, quatre-vingts ans avant la querelle du jansénisme ; et si nous faisions ici un chapitre de l’histoire générale des Jésuites, il serait aisé de montrer que, dès le xvie siècle, le nouvel institut a jeté le trouble partout. Le pape Paul IV, prenant les Jésuites en flagrant délit de désobéissance à ses ordres, les appelait « des enfants rebelles et des fauteurs d’hérésie ». Saint Charles Borromée constatait, en 1579, leur profond mépris pour l’épiscopat, et il exhalait ses plaintes sur l’odieuse conduite de leur Père Mazzarino. L’archevêque d’Urbins écrivait à ce même saint Charles, en 1584, que les choses n’allaient pas mieux dans son diocèse, et qu’un jésuite insolent s’était vanté de lui « apprendre à vivre », vu qu’il avait déjà « fait la barbe à bien d’autres ». Papes, rois, empereurs, prélats, ordres religieux, universités, corps constitués de toute espèce, tout le monde déplorait les excès d’une société si envahissante. La France et Paris se distinguaient surtout par leur peu d’enthousiasme à recevoir les nouveaux venus. La Sorbonne disait, en propres termes, que la société qui s’attribuait le nom de Jésus semblait périlleuse en matière de foi, ennemie de la paix de l’Église, et plutôt née pour la ruine que pour l’édification des fidèles. On prêchait contre les Jésuites dans les chaires, et plusieurs évêques, imitant l’évêque