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L’AMANT

la veille, commander sa robe et sa parure de noce. Comment concevoir une telle conduite, d’une personne remplie de délicatesse, de sensibilité, et qui montroit d’ailleurs des principes si sévères et si purs ? Rosenthall se perdoit dans ces réflexions ; mais la certitude d’être aimé lui fournissoit un sujet de rêverie bien plus intéressant : Non, se disoit-il, je ne manquerai point aux devoirs sacrés de la reconnoissance et de l’hospitalité. Léontine, qui ne peut que soupçonner mes sentimens, n’en recevra jamais l’aveu ; je partirai sans avoir goûté la consolation de lui ouvrir mon cœur ! Mais, que dis-je ? n’a-t-elle pas lu dans ce triste cœur ? ne serai-je pas récompensé de mon silence par son estime ? Elle m’aime : ne se dira-t-elle pas tout ce que je suis forcé de taire ?… Elle m’aime ! je suis aimé de Léontine ! je puis gémir de mon sort, mais je dois du moins m’en enorgueillir…

Rosenthall étoit encore dans le parc à dix heures, quand on vint l’avertir que l’on servoit le souper.