Page:Genlis - Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, tome 3, 1802.pdf/398

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
394
Mlle DE CLERMONT.

enchanteur !… Un seul homme, toujours présent à ces lectures, gardoit un morne et froid silence, et mademoiselle de Clermont le remarqua. Cet homme étoit le duc de Melun, dernier rejeton d’une maison illustre. Son caractère, ses vertus lui donnoient une considération personnelle, indépendante de sa fortune et de sa naissance. Quoique sa figure fût noble et sa physionomie douce et spirituelle, son extérieur n’offroit rien de brillant ; il étoit froid et distrait dans la société ; avec un esprit supérieur, il n’étoit point ce qu’on appelle un homme aimable, parce qu’il n’éprouvoit aucun désir de plaire, non par dédain ou par orgueil, mais par une indifférence qu’il avoit constamment conservée jusqu’à cette époque. Trop austère, trop éloigné de toute espèce de dissimulation pour plaire, il étoit cependant généralement aimé dans le monde : on ne trouve pas que les gens vertueux soient amusans ; mais lorsqu’on les croit sincères, on pense qu’ils sont les amis les plus solides et les rivaux les moins dangereux, surtout à la cour ; on a sur eux tant d’avantages !