Agar. Que dis-tu ? Grand Dieu !
Iſm. S’il en reſtoit encore, & ſi vous éprouviez ce que je ſens, Maman, je ne le boirois pas.
Agar. Ô mon Fils ! peux-tu me croire aſſez barbare ?
Iſm. Hélas ! la douleur égare & trouble mon eſprit, pardonnez-moi.
Agar. J’ai voulu te garantir du ſoleil. — Je me ſuis levée. — J’ai renverſé ce vaſe, & je t’ai donné la mort !
Iſm. Non, Maman, — non — cette eau n’auroit pu me ſuffire.
Agar. Quelle pâleur couvre ſon front ! — mon Fils !
Iſm. Maman, donnez-moi votre main, — que je la baiſe encore.
Agar. La ſienne eſt froide & tremblante. — Mon Enfant ? — Il ne me répond pas ! — Iſmaël, ouvre les yeux ! Embraſſe encore une fois ta malheureuſe mère. — (Elle met la main ſur ſon cœur.) Il bat encore. — (Elle ſe met à genoux.) Ô toi, Être ſuprême & bienfaiſant, à qui tout eſt poſſible ! toi, ſoutien, protecteur des infortunés, daigne jetter un regard ſur moi ! — Je me ſoumets, ſi tu l’ordonnes ; mais ma confiance en ta bonté, égale mon obéiſſance ! — Conſerve-moi le bien que tu m’as donné ; ou du moins, grand Dieu ! ne me condamne point à vivre ! Tu vas prononcer, j’attends mon arrêt. — Mais c’eſt un Pere qui va le rendre ! — (Elle retombe auprès de ſon Fils, le viſage caché.) (Après un long ſilence)
L’Ange. (derrière le Théâtre.) Agar ?