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Saint Chrysostôme est diffus, mais pur dans sa diction. Il ne cherche point de faux ornements. Tout, chez lui, tend à la persuasion, et il mérite bien le titre de grand orateur que les siècles lui ont décerné.

Saint Grégoire de Naziance est plus concis et plus poétique, mais un peu moins appliqué à la persuasion. Cependant ses adieux à Constantinople, l’éloge funèbre de son ami, saint Basile, et surtout sa lettre à une vierge qui était tombée, sont d’une véritable éloquence.

Pour bien apprécier le mérite des Pères de l’Église, il faudrait les comparer, non à Démosthène et à Cicéron, séparés d’eux par tant de siècles, mais aux orateurs profanes de leur temps qui ont acquis le plus de célébrité, par exemple, saint Basile à Libanius. Quelle différence entre l’un et l’autre ! Que saint Basile est solide et naturel ! Que Libanius est vain, affecté, puéril !

Mais pourquoi parler ici des orateurs profanes ? Ce n’est pas de l’éloquence humaine qu’il faut chercher dans les saints Pères. C’est un nouveau genre d’éloquence dont le monde n’avait point d’idée avant le Christianisme, de même qu’il n’en avait aucune des sublimes et héroïques vertus que le fils de Dieu est venu prêcher à la terre ; une éloquence qui est autant au-dessus de l’éloquence humaine que les intérêts de la vie éternelle sont au-dessus de ceux de la vie mortelle, une éloquence qui a son principe dans l’amour de Dieu dont les Pères étaient embrasés, et ses modèles dans l’Écriture-Sainte dont ils se nourrissaient sans cesse.

Leur mission était d’inspirer à leurs auditeurs l’amour des humiliations, des souffrances, de la mort même, pour qu’ils devinssent semblables à Jésus-Christ. De tels sentiments sont au-dessus de la nature. Il fallait donc que la parole qui les répandait fût animée par un esprit tout divin.

Qu’on lise saint Ignace, est-ce un homme que l’on entend ? Oui, mais c’est un homme que la foi et l’amour ont élevé au-dessus de l’humanité. Il n’y a qu’une religion d’amour, il n’y a que la religion d’un Dieu mort sur la croix pour le salut