Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 1.djvu/90

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Son nom, l’exécration du genre humain, suffit pour montrer à quels hommes était alors livré l’empire du monde. Il semble que Dieu, en même temps qu’il punissait les Romains des crimes commis dans la conquête de l’univers, voulût manifester, par le plus étonnant contraste, la vertu des premiers Chrétiens. Néron avait fait venir à Rome Simon le magicien, qui s’était donné le nom de vertu de Dieu et qui se vantait d’opérer des miracles. Mais quand Pierre et Paul l’eurent confondu, Néron, qui avait été séduit par les prestiges de Simon, en conserva un ressentiment profond contre les Chrétiens. Quatre ans après le martyre de saint Pierre et de saint Paul, ce prince avait mis le feu à Rome, et le feu avait duré six jours. Il voulut repaître lui-même ses yeux du spectacle d’un bel incendie, rebâtir Rome, et lui donner son nom. Pendant que la ville était en proie aux flammes, il se revêtit d’un habit de théâtre, et d’un lieu élevé il contempla ce spectacle en chantant la prise de Troie, puis il accusa les Chrétiens de cet incendie. On sait comment Tacite et Suétone ont parlé de cet horrible événement. « Ni les ordres donnés par les magistrats chargés de veiller à la sûreté de la ville, dit Tacite, ni l’argent que le prince fit distribuer au peuple, ni les sacrifices qu’on offrit aux dieux, n’empêchèrent de croire que Néron était le seul auteur des désastres qui venaient d’arriver. Mais, pour faire cesser ce bruit, il produisit des accusés, et fit périr dans les plus cruels supplices des hommes détestés à cause de leur infamie, vulgairement appelés Chrétiens. Christ, d’où vient leur nom, avait été puni de mort sous Tibère, par l’intendant Ponce-Pilate. Cette pernicieuse superstition, continue Tacite, réprimée pour un temps, reprenait vigueur, non-seulement dans la Judée, source du mal, mais à Rome, où vient aboutir et se multiplier tout ce que les passions inventent ailleurs d’infâme et de cruel. On arrêta d’abord des gens qui s’avouaient coupables, et, sur leur déposition, une multitude de Chrétiens, que l’on convainquit moins d’avoir brûlé Rome que de haïr le genre humain. On joignit les insultes aux supplices. Les uns, enveloppés de peaux de bêtes féroces, furent dévorés par des