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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/320

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sacrés dans l’univers. Depuis le temps de Cyrus, ils étaient répandus dans la Perse, dans la Syrie, et jusqu’à la Chine. Depuis Alexandre, et sous ses successeurs, ils se trouvaient en grand nombre dans les provinces de l’Asie-Mineure et dans l’Égypte ; depuis Pompée, qui les subjugua, ils pénétrèrent dans l’Italie et dans toutes les parties de l’empire ; mais, en Égypte et en Grèce, ils formaient, sous le nom de Juifs hellénistiques, une classe d’hommes qui ne manquait ni de savoir ni de richesses. Il semble, au contraire, que ceux qui vinrent à Rome étaient confondus avec les plus vils Égyptiens et ces adorateurs de la déesse Isis, souvent réprimés par le Sénat romain. On se moquait de leurs jeûnes rigoureux, de leur circoncision et de leur sabbat : Horace y fait allusion ; Auguste en plaisante dans une lettre.

Au commencement du règne de Tibère, ils étaient si nombreux à Rome, et comptés pour si peu de chose par la tyrannie, que ce prince en fit déporter quatre mille sur le climat insalubre de la Sardaigne. La persécution fut alors assez rigoureuse pour que les philosophes païens, qui avaient adopté la diète pythagoricienne, craignissent d’être confondus avec ces sectateurs de cultes étrangers, que l’on reconnaissait surtout à l’abstinence de certaines viandes.

Cependant, plusieurs décrets du Sénat attestent que, dans les provinces éloignées de l’empire, la liberté du culte juif était assurée ; et même à Rome les Juifs ne tardèrent pas à reparaître, perdus dans le chaos de cette ville immense. Quelques-uns d’entre eux célébraient la fête d’Hérode, et tous observaient rigoureusement le sabbat. Le peuple et les poëtes s’en moquaient. Pauvres et méprisés, ayant toujours avec eux leurs corbeilles de voyage, ils occupaient hors de Rome un lieu jadis consacré, et pour lequel ils payaient une taxe au trésor public. Comme tous les persécutés, ils avaient quelque chose de mystérieux : le peuple les maltraitait et les craignait tour à tour ; ils étaient devins, mendiants, astrologues, et vendaient à bas prix des philtres et des prédictions, au gré de ceux qui les consultaient.