Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/379

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Je vous le demande encore, quel homme, croyant à la résurrection, consentirait à se faire le tombeau vivant d’un corps qui doit ressusciter ? Est-il possible, en effet, qu’avec une semblable conviction il eût le courage de dévorer ce cadavre, comme s’il ne devait point revivre ? Est-il possible qu’il agisse, comme si Dieu ne devait point lui redemander ce corps qu’il aura enseveli dans ses entrailles, puisqu’il sait bien que la terre elle-même doit rendre un jour les morts qu’elle a reçus ? N’est-il pas plus vraisemblable que des hommes qui ne croient ni à la résurrection, ni au jugement dernier, de quelque manière qu’on ait vécu ; qui pensent, au contraire, que l’âme meurt avec le corps, n’est-il pas plus vraisemblable qu’affranchis de tout frein, ils se portent à toutes sortes de crimes ? Par une raison contraire, n’éviteront-ils pas avec tout le soin possible les fautes même les plus légères, ceux qui sont persuadés que rien ne doit échapper au jugement de Dieu, et que le corps partagera le châtiment de l’âme, après avoir été l’instrument de ses désordres et de ses passions. S’il paraît chimérique que des corps réduits en pourriture et en poussière soient rendus un jour à leur premier état, on pourrait peut-être nous accuser de faiblesse d’esprit, mais non de méchanceté ; car si nous nous trompons, notre erreur ne nuit à personne.

Je pourrais vous prouver que nous ne sommes point les seuls à reconnaître la résurrection des morts, et que la plupart des philosophes pensent comme nous sur ce point ; mais cette démonstration serait hors de saison. Je ne veux pas qu’on me reproche de mêler à mon sujet des discussions qui lui seraient étrangères ; je dirai seulement que ceux qui ont écrit sur la nature des choses sensibles, matérielles ou immatérielles, ont toujours reconnu que les esprits existent avant les corps, et que tout ce qui tombe sous les sens a été fait après les créatures spirituelles, bien que ce soit les objets sensibles qui nous frappent d’abord. Ces philosophes prétendent que ces objets corporels ont été formés de l’assemblage des premiers, c’est-à-dire que ceux qui tombent sous les sens naissent de ceux qui ne sont conçus que par l’esprit ; d’où il suit, comme l’ont pensé Platon et Pytha-