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chacune en particulier, selon sa nature et sa destinée. On me dispensera d’entrer ici dans ce détail des soins que chaque être semble exiger de la Providence, conformément à sa nature. L’homme, dont je dois m’occuper ici, a besoin d’aliment, parce qu’il est faible ; de successeurs, parce qu’il est mortel ; et d’un jugement à venir, parce qu’il est raisonnable. Si tout cela tient à sa nature, s’il a besoin d’aliments pour soutenir sa vie, de successeurs pour perpétuer sa race, et d’un jugement futur, à raison de ce besoin de se nourrir et de se propager, car l’homme a des bornes à respecter, on peut conclure que le besoin de nourriture, de propagation, se rapportant à tout l’être de l’homme, le jugement s’étendra à tout l’homme tel qu’il est, c’est-à-dire au corps et à l’âme ; c’est l’homme tout entier qui doit rendre compte de ses actions, et en recevoir le châtiment ou la récompense. Le jugement, pour être juste, doit appliquer le châtiment ou la récompense à l’un et à l’autre : il ne convient pas que l’âme subisse seule le châtiment ou remporte le prix de toutes les actions de l’homme, car par elle-même elle n’est pas portée à la volupté, aux plaisirs des sens ; il serait pareillement injuste que le corps fût seul récompensé ou puni (par lui-même, en effet, il est incapable de discerner le bien du mal, ce qui est permis de ce qui ne l’est pas ; c’est à l’âme et au corps réunis qu’il faut s’en prendre de ce que l’homme a fait). Or, la raison nous démontre que ce jugement n’a point lieu dans cette vie (peut-on en effet la considérer comme une récompense des mérites du juste, puisqu’elle lui est commune avec une foule d’athées, de voluptueux, de scélérats, que n’atteint pas l’infortune jusqu’à la fin de leur carrière, tandis que celui qui se dévoue à la pratique de toutes les vertus se voit continuellement exposé à la douleur, à l’injure, à la calomnie, aux tourments, à tous les genres de maux). Il n’a point lieu immédiatement après la mort (l’homme alors ne subsiste pas tout entier, puisque l’âme est séparée du corps, et que le corps lui-même, tombé en dissolution et rendu aux éléments dont il avait été tiré, ne conserve rien de sa première nature ni de sa forme, bien loin de garder le souvenir du passé).