Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/445

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mense océan ; comment sont nés les astres brillants et le ciel qui s’étend au-dessus de nos têtes ; comment, de ceux-ci, sont sortis les dieux qui répandent sur nous leurs bienfaits ; comment ils ont divisé et partagé les honneurs et les richesses ; comment ils ont pu occuper le ciel, embarrassé au commencement de tant de sphères. Apprenez-moi tout cela, ô Muses, vous qui habitez le séjour céleste depuis le commencement, et dites-moi quelle est la première origine de tous ces êtres. » Mais comment les Muses auraient-elles pu le lui apprendre, puisqu’elles sont postérieures au monde ? Et comment auraient-elles pu raconter à Hésiode des choses qui s’étaient passées avant la naissance de leur père ?

VI. Le même poëte, parlant de la matière et de la création du monde, s’exprime en ces termes : « Au commencement exista le chaos, puis la terre, dont le large sein est l’asile le plus sûr des immortels qui occupent les sommets de l’Olympe, ou le ténébreux Tartare dans les entrailles de la terre. L’amour existait aussi, lui qui est le plus beau d’entre les immortels, qui charme les soucis et qui triomphe de la sagesse des hommes et des dieux. Du chaos naquirent l’Érèbe et la nuit obscure ; puis de la nuit sortirent l’air et le jour, qu’elle enfanta de son union avec Érèbe. La terre, de son côté, produisit d’abord la voûte des cieux, parsemée d’étoiles, de manière à en être enveloppée tout entière et à devenir le séjour fortuné des dieux. Elle engendra ensuite les hautes montagnes et les grottes si agréables aux nymphes qui habitent les rochers. Enfin l’eau stérile enfanta, non dans son amour, mais dans sa fureur, le Pont-Euxin ; et puis ensuite s’étant unie avec le ciel, elle engendra l’océan. » Ce poëte, en nous faisant l’énumération de tous ces êtres créés, est encore à nous dire quel était leur auteur. Car, si le chaos était au commencement, il y avait donc une matière incréée et préexistante. Mais qui l’a disposée, qui lui a donné sa forme et ses proportions ? Est-ce la matière qui s’est donné à elle-même sa forme et sa beauté ? Car Jupiter est bien postérieur, non-seulement à la matière, mais encore au monde et à une foule d’hommes ; et il en est de même de Saturne, son père. Ou bien