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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/517

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Après tant d’essais aussi infructueux qu’humiliants, comment notre orgueilleuse raison ose-t-elle encore vouloir marcher seule pour arriver à la connaissance de Dieu, de l’homme et de l’univers ; comment peut-elle dans certains ouvrages s’annoncer comme une souveraine qui fait tous les jours de nouvelles conquêtes par les lumières qu’elle répand sur ces grandes vérités ? Que sont tous les systèmes du jour, sinon la plupart des absurdités anciennes revêtues de formes nouvelles.

Hors de nos livres sacrés, nous ne trouvons que des guides plus ou moins trompeurs, comme ceux dont parle le grand-prêtre de Cérès dans l’ingénieuse fiction qu’il met en tête de son discours.

« Je songeais, dit-il, que j’avais été tout à coup jeté dans un grand chemin au milieu d’une foule immense de personnes de tout âge, de tout sexe et de tout état. Nous marchions à pas précipités, un bandeau sur les yeux ; quelques-uns poussant des cris de joie, la plupart accablés de chagrins et d’ennui. Je ne savais d’où je venais et où j’allais. Je me laissais entraîner au torrent, lorsque j’entendis une voix qui s’écriait : C’est ici le chemin de la lumière et de la vérité. Je la suivis avec émotion. Un homme me saisit par la main, m’ôta mon bandeau et me conduisit dans une forêt couverte de ténèbres aussi épaisses que les premières ; nous perdîmes bientôt la trace du sentier que nous avions suivi jusqu’alors, et nous trouvâmes quantité de gens qui s’étaient égarés comme nous. Leurs conducteurs ne se rencontraient point sans en venir aux mains ; car il était de leur intérêt de s’enlever les uns aux autres ceux qui marchaient à leur suite. Ils tenaient des flambeaux et en faisaient jaillir des étincelles qui nous éblouissaient. Je changeai souvent de guides ; je tombai souvent dans des précipices, souvent je me trouvai arrêté par un mur impénétrable : mes guides disparaissaient alors et me laissaient dans l’horreur du désespoir. Excédé de fatigue, je regrettais d’avoir abandonné la route que tenait la multitude, et je m’éveillai au milieu de ces regrets. »

Sans la foi, n’est-ce pas à des guides semblables que nous sommes abandonnés quand nous demandons notre chemin aux philosophes dont se moque Hermias, ou bien à ceux de notre époque ? C’est toujours dans la nuit la plus profonde, en face d’un mur impénétrable, qu’ils nous laissent, après voir fait briller quelques lueurs de vérité échappées par hasard et toujours empruntées à nos livres sacrés.

Ne quittons pas Hermias sans faire connaître les diverses éditions qu’on en a publiées. Les meilleures sont : 1° Bâle, 1553, in-8o, grec, avec une version latine de J.-J. Fugger ; 2° Zurich, 1560, in-fol., Curante Gesnero ;