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SAINT IRÉNÉE.

peu à peu par cette première nourriture, nous devinssions capables de nous nourrir du corps et du sang du Verbe, et de contenir en nous celui qui est le pain de l’immortalité et l’esprit du Père.

C’est là ce qui fait dire à saint Paul parlant aux Corinthiens : « Je ne vous ai nourris que de lait, et non pas de viandes solides, parce que vous n’en étiez pas alors capables. » Or, cette nourriture, c’est le Christ même dans son humanité. L’esprit du Père ne s’était pas encore reposé sur vous à cause de votre trop grande imperfection ; « en effet, ajoute-t-il, puisqu’il y a parmi vous des jalousies et des disputes, n’est-il pas visible que vous êtes charnels, et que vous vous conduisez selon l’homme ? » c’est-à-dire que l’esprit du Père n’était pas encore en eux, à cause de leur imperfection et de leur peu de progrès dans la voie du salut. L’apôtre ne pouvait donc pas encore leur donner cette nourriture solide (car ceux sur qui les apôtres imposaient les mains recevaient l’Esprit saint qui est la nourriture forte de la vie spirituelle) ; or, ceux à qui il parlait n’étaient pas encore en état de recevoir cette nourriture, par leur connaissance imparfaite de Dieu et leur peu d’expérience et d’avancement dans les voies de la perfection. Ainsi, il est donc vrai de dire qu’un Dieu a eu la puissance de douer l’homme de la perfection ; mais que l’homme, en qualité d’être créé, n’était pas capable de s’approprier cette perfection ; ou que même, s’il eût pu en être doué, il n’eut pas été capable de la conserver en lui. Voilà pourquoi le verbe de Dieu, malgré sa grandeur, s’est abaissé jusqu’à revêtir l’enfance de l’homme, afin que l’homme fût capable de le comprendre dans cet état d’abaissement. Ainsi les trésors de la puissance divine sont inépuisables ; mais l’homme, parce qu’il est créé, ne peut jouir des priviléges de l’être incréé.

La puissance, la sagesse et la bonté de Dieu éclatent de toutes parts dans les œuvres de la création ; sa puissance et sa bonté se montrent en ce qu’il a créé et formé des choses qui étaient dans le néant, et sa sagesse brille dans la perfection et la convenance de leurs parties et de leurs rapports entre elles. Par-