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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 4.djvu/120

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pour nous l’occasion non d’une peine mais d’un combat ; la souffrance fortifie le courage, l’infortune est l’école de la vertu, la vigueur de l’esprit et du corps s’engourdit si elle n’est exercée par l’épreuve. Tous vos héros, que vous proposez comme autant de modèles, ont reçu de l’adversité leur lustre et leur éclat. Ne croyez pas que Dieu soit impuissant pour nous secourir ou qu’il nous dédaigne, puisqu’il est le maître de tout et qu’il aime les siens. Mais il explore, il visite chacun de nous par l’adversité, il éprouve le caractère par le péril, il interroge ainsi notre cœur jusqu’au dernier soupir, sûr comme il l’est que rien ne peut lui échapper. La tribulation est pour nous ce que le feu est pour l’or ; elle nous fait connaître.

XXXVII. Quel beau spectacle pour la Divinité que la vie d’un Chrétien qui se mesure avec la douleur, qui tient ferme devant les menaces, devant les supplices, devant les tortures ; qui se rit de l’appareil bruyant du trépas et lui insulte ; qui lève hardiment l’étendard de sa liberté contre les rois et les empereurs ; qui ne cède qu’à Dieu dont il relève ; qui, triomphant et victorieux, brave le tyran dont l’arrêt l’envoie à la mort ; oui, c’est lui le vainqueur, puisqu’il a conquis ce qu’il désire. Quel soldat ne défie pas hardiment le péril sous les yeux de son général ? car personne n’est couronné avant l’épreuve. Et cependant ce général ne peut donner ce qu’il n’a pas ; il peut honorer la vaillance, il ne saurait prolonger la vie. Le soldat de Dieu n’est ni délaissé dans le combat, ni éteint dans la mort. Ainsi donc nous pouvons paraître malheureux, nous ne pouvons l’être en effet. Vous-même n’élevez-vous pas jusqu’au ciel les héros du malheur ; par exemple un Mucius Scévola, qui aurait succombé au milieu des ennemis s’il n’eût puni lui-même sa main, pour s’être égarée en préparant la mort d’un tyran ? Combien des nôtres ont enduré, sans pousser la moindre plainte, le supplice du feu qui consumait, je ne dis pas une de leurs mains, mais tout leur corps, lorsqu’il était en leur pouvoir d’échapper au bourreau ? Que fais-je ? Je compare ces hommes avec Mucius, avec Aquilius, avec Régulus ; mais chez nous de tendres enfants, de faibles femmes, se jouent des croix, des tourments,